Les diktats de la mode

07/10/2023

Avez-vous remarqué que sur les réseaux sociaux, notamment sur Instagram, il y a beaucoup de personnes qui posent avec pléthore de vêtements chics à la mode? Ils exposent aussi leur train de vie apparemment luxueux (p. ex. : vêtements griffés, vêtements sur mesure, montres luxueuses, véhicules hors de prix, maison somptueuse, résidence secondaire, voyages de rêve). Quand on sait que près de la moitié de la population mondiale vit avec moins de 5 dollars par jour et que beaucoup de nos semblables ne mangent pas à leur faim, l'étalage d'une telle richesse est carrément scandaleux et choquant.

Certes, on éprouve tous le besoin de plaire et de séduire, à divers degrés d'intensité. C'est normal. Je dirais même que c'est programmé dans nos gènes pour assurer la survie de l'homo sapiens. L'industrie de la mode a bien compris ce besoin et a su l'exploiter pleinement en proposant des styles vestimentaires relativement passagers. L'objectif de cette industrie est clairement de nous faire consommer toujours davantage.

Sébastien-Roch Nicolas de Chamfort, a écrit une sentence particulièrement percutante au sujet de la mode dans son livre Maximes et pensées :

« Les riches réussissent toujours à vendre leur société à la vanité des pauvres ».

La sentence de Chamfort montre bien à quel point ce poète, journaliste et moraliste avait bien saisi l'aspiration des autres classes à accéder au mode de vie de la classe dominante. Derrière cette aspiration, se cache évidemment l'envie, un sentiment de grande tristesse à la vue du bonheur, des biens et du mode de vie d'autrui. Cette sentence a bien beau être d'une autre époque (XVIIIe siècle), elle s'applique parfaitement au temps présent.

Déjà à l'adolescence, je sentais la pression de mes pairs pour me conformer aux caprices des tendances par rapport à l'habillement. Venant d'un milieu défavorisé, je n'avais pas les moyens financiers de me conformer aux diktats de la mode. Il y a même eu une année où je n'avais pas les moyens de remplacer mon sac d'école; je me suis contenté de sacs en plastique pour le reste de l'année scolaire. Je n'étais pas plus malheureux pour autant.

Désormais, la mode s'inscrit dans la mouvance de la société de consommation. À chaque saison sa nouvelle tendance vestimentaire – je dis d'ailleurs en blague que la mode est tendancieuse. Pour être à la mode, il faut constamment renouveler le contenu de son vestiaire et de son coffre à bijoux. J'ai déjà travaillé avec une collègue particulièrement bien nantie qui achetait tous les jours un vêtement ou un bijou. C'était pour elle un simple divertissement pour chasser l'ennui, sans conséquence apparente. Bien entendu, son comportement suscitait la jalousie au sein de l'unité de travail, au point que plusieurs de mes collègues se sont mises à consommer davantage pour bien paraître. Évidemment, personne ne pouvait l'égaler, puisque personne ne disposait d'autant de ressources financières.

Les médias sociaux sont d'extraordinaires plates-formes en ligne qui permettent de publier du contenu (photos, vidéos, textes et autres créations numériques) et d'établir son réseau social en ligne, c'est-à-dire d'établir des liens avec d'autres personnes, et même, avec certaines organisations. C'est grâce aux médias sociaux que :

  • j'ai pu reprendre contact avec certaines personnes perdues de vue depuis longtemps;
  • je transmets mes connaissances en cuisine à des personnes vivant ici et là dans le monde;
  • je réponds à des questions et à des commentaires de personnes d'ici et d'ailleurs;
  • je chercher à faire avancer les familles et les personnes vers une alimentation de plus en plus saine et variée ainsi que vers une véritable satiété;

  • je promeus une alimentation santé et savoureuse qui s'éloigne des produits ultra-transformés de l'industrie agroalimentaire et qui se rapproche plutôt des cuisines traditionnelles et ancestrales des différents pays et des diverses cultures;

  • je donne des conseils judicieux en cuisine à des personnes que je ne connaissais pas avant l'arrivée des médias sociaux.

Malheureusement, les médias sociaux n'ont pas que des avantages. Ils ont aussi des inconvénients. Parmi les principaux, il y a l'étalage de la richesse et d'un mode de vie extravagant qui suscitent envie, jalousie et convoitise. À en croire les publications sur les médias sociaux, notamment sur Instagram, on dirait qu'une grande partie de la population mondiale est suffisamment fortunée pour ne porter que des vêtements dernier cri griffés, pour être très souvent en vacance, pour aller souvent au restaurant et pour s'offrir tout ce qu'elle désire. En comparant ce tableau avec les données de l'Organisation des Nations unies, on constate bien qu'il s'agit d'une vision complètement déformée de la réalité. L'opulence et l'ostentation sont monnaies courantes sur les réseaux sociaux.

Plus on suit de près la mode, plus on consacre une part importante du budget aux vêtements et aux parures. Par conséquent, moins on épargne en prévision du futur et de la retraite. La mode peut condamner les moins bien nanties qui la suivent à tout prix à sacrifier leur avenir pour satisfaire un désir de bien paraître dans le présent. La vanité l'emporte sur la prévoyance.

L'anticonsumérisme faisant partie de mes valeurs, j'ai plutôt tendance à ne pas suivre la mode. Cela dit, je n'encourage personne à ignorer complètement la mode, bien au contraire. J'invite tout simplement les gens à faire preuve de gros bon sens et à éviter le plus possible les modes passagères et frivoles. Personnellement, j'ai appris assez tôt à choisir des vêtements classiques et des accessoires qui ne se démodent que peu dans le temps. Par exemple, je choisis soigneusement la monture de mes lunettes pour ne pas avoir à la changer avant 6, 8 ou même 10 ans. Pourquoi dépenser inutilement de l'argent pour être à la page?

Les diktats de la mode ne concernent pas uniquement l'habillement et les parures; ils touchent aussi la forme des corps. Depuis quelque temps, les critères de beauté chez la femme sont : taille particulièrement svelte, ventre plat ou creux, poitrine très généreuse et lèvres pulpeuses. De nombreuses femmes n'hésitent pas à recourir à la chirurgie plastique pour se conformer à ces critères.

Chez les hommes, les critères de beauté sont : ventre plat et musclé (six pack), bras hypermusclés, dos musclé en forme de V ou même de Y, cou large, mâchoire carrée, cheveux très ras sur les côtés et l'arrière de la tête et cheveux touffus sur le dessus de la tête. De nombreux hommes n'hésitent pas à passer beaucoup de temps au gym et à consommer des poudres hyperprotéinées pour se conformer à ces critères. Certains vont même jusqu'à avoir recours à la chirurgie plastique pour sculpter le corps.

On dirait qu'il n'existe qu'un seul type de féminité et qu'un seul type de virilité. Ces stéréotypes sont particulièrement présents sur les réseaux sociaux. Il y a de quoi complexer toute personne qui ne correspond pas à ces stéréotypes.

Ayant quelques malformations congénitales causées par le syndrome de Poland, je me suis depuis longtemps libéré de mes complexes et je ne ressens aujourd'hui aucun besoin de me conformer au stéréotype de virilité actuel. En fait, ce syndrome m'a permis de prendre du recul et de voir la beauté en tout un chacun.

En guise de conclusion, je dirais que suivre les diktats de la mode revient à s'assujettir volontairement à l'industrie de la mode, c'est lui payer un lourd tribut pour satisfaire un besoin de bien paraître.

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